Selon les auteurs de cette étude (*) conduite par le professeur Kirk Winemiller, spécialiste des sciences de la faune et de la pêche à la Texas A & M University, et cosignée par une quarantaine de chercheurs à l’œuvre dans huit pays, les promoteurs des grands projets de barrages hydroélectriques sur les bassins de ces trois fleuves ont tort de surestimer leurs avantages économiques et de sous-estimer l’importance de leurs impacts sur la biodiversité.
Ces aménagements – les chercheurs ont recensé 450 barrages supplémentaires prévus ou déjà en construction dans ces bassins fluviaux - entraînent non seulement le déplacement et la relocalisation forcée de populations ainsi que de vastes projets de déforestation, mais menacent directement la survie de nombreuses espèces uniques de poissons.
"On peut raisonnablement douter, lit-on dans l’article paru dans la revue ’Science’, que les communautés rurales des bassins de l’Amazone, du Congo et du Mékong bénéficieront un jour de cet approvisionnement énergétique et de la création d’emplois pour compenser leurs manques à gagner en matière de pêche et de production agricole et la perte de leurs biens propres. Il est donc impératif d’améliorer les processus d’évaluation de ces nouveaux barrages et le choix de leurs emplacements".
Les chercheurs américains se montrent particulièrement critiques à l’égard des études d’impact sur l’environnement : "des millions de dollars peuvent être dépensés pour des études qui n’ont aucune influence réelle sur la façon dont les barrages sont conçus et qui parfois sont publiées alors que leur construction a déjà commencé". De quoi se demander, au-delà de la non transparence des décisions, si les bailleurs de fonds et le public sont conscients des risques et des impacts que ces barrages représentent pour des millions de personnes.
On peut faire mieux, disent les chercheurs. Aujourd’hui on dispose en effet de suffisamment de données probantes sur les services écosystémiques et sur la biodiversité pour mieux analyser les avantages et les inconvénients des aménagements hydroélectriques. L’intégration de ces données - débits hydrologiques, dynamique des sédiments, productivité des écosystèmes, etc. - dans les protocoles d’évaluation permettrait de s’assurer que les objectifs de production d’énergie peuvent être atteints tout en évitant les projets les plus dommageables à l’environnement. (Source : Virginia Tech, Blacksburg, USA)
(*) K.O. Winemiller & all., "Balancing hydropower and biodiversity in the Amazon, Congo, and Mekong",
Science, 8 Jan 2016, Vol.351, Issue 6269, pp.128-129.