Chez les Karajas, toute la mythologie et tous les rituels tournent autour de l’eau. Leurs techniques de subsistance, ils les ont développées en fonction du cycle hydrologique, leurs croyances et leurs modes de vie s’expriment au rythme de la respiration du fleuve.
Leur existence se déroule en effet sur quatre saisons qui n’ont pas grand chose à voir avec le calendrier civil, à savoir : les premières pluies et le début de la montée des eaux, la période de crues et d’inondations, la baisse des eaux du fleuve et finalement la période d’étiage.
A chacune de ces saisons correspondent des activités piscicoles et agricoles différentes et donc aussi des régimes alimentaires variables : pêche difficile en période de crues mais abondance de petits poissons pendant la décrue, alternance de cultures de cycles longs et courts, de cueillette de fruits en forêt ou de recherche d’œufs de tortue, etc. La nourriture y est toujours fraîche … et de saison !
L’univers fluvial fournit aux Karajas tout ce dont ils ont besoin pour vivre : bois pour l’habitat et les pirogues, roseaux pour les flèches utilisées pour la capture du poisson, fibres de palmier pour fabriquer filets et nattes, herbes pour la médecine traditionnelle, colorants naturels et autres matériaux utiles à la confection de multiples objets, peignes, colliers, etc.
Mais Edith Wenger tire aussi la sonnette d’alarme : le développement économique est en train de rattraper les Karajas, leurs territoires et leurs ressources naturelles sont souvent exploitées, voire privatisées ; leur petit nombre (6 habitants au kilomètre carré) n’incite pas les autorités politiques à tenir compte de leur existence.
"Pourtant leur connaissance intime du fleuve, de son cycle hydrologique, de ses ressources, devrait permettre aux décideurs de pouvoir gérer le bassin fluvial en le respectant, en conservant intactes ses fonctions pour le plus grand bien à long terme de tous les usagers."