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17 juillet 2015.

Suisse : l’armée porteuse d’eau vers les alpages touchés par la canicule

Le ministère suisse de la défense, faisant suite à une demande (...)

Le ministère suisse de la défense, faisant suite à une demande du canton de Vaud, a donné son feu vert à une intervention de l’armée pour approvisionner en eau quelque 20’000 bovins en estivage sur les hauts-pâturages du Jura. Il n’est pas exclu, en fonction de l’évolution de la météo, qu’une opération similaire soit mise sur pied également du côté des alpages des Préalpes.

Dans les chalets d’alpage du Jura, dont les reliefs calcaires ne retiennent pas l’eau, les éleveurs ont depuis fort longtemps opté pour la récupération de l’eau de pluie grâce à de très vastes toitures et de grandes citernes souterraines où ils s’approvisionnent au fur et à mesure des besoins. En période de canicule, de forte sécheresse et d’absence quasi totale de précipitations, comme c’est le cas actuellement, ces réservoirs sont vite épuisés et le ravitaillement par citernes mobiles se révèle lui aussi problématique. Et pour cause : pour un bovin, le niveau de consommation quotidienne d’eau en été se mesure en plusieurs dizaines de litres et peut largement dépasser l’hectolitre au gré de sa production laitière.

Au vu des prévisions météorologiques qui n’annoncent pas de grandes pluies avant la fin du mois de juillet, les autorités du canton de Vaud ont adressé un questionnaire aux exploitants des 680 alpages vaudois situés dans le Jura et les Préalpes et où paissent actuellement quelque 45’000 têtes de bétail. Les réponses venues en retour montrent que les troupeaux du massif jurassien (environ 20’000 bêtes) sont les plus touchés : on y estime à environ 6 millions et demi de litres les besoins en eau pour la seule semaine du 20 au 26 juillet.

Pour faire face à cette situation alarmante, le canton de Vaud a demandé et obtenu des autorités fédérales l’appui de l’armée qui sera engagée, durant une quinzaine de jours, dans des opérations de distribution d’eau par voie terrestre et aérienne. Plusieurs dizaines de militaires seront provisoirement affectés à ce plan catastrophe, ainsi que des effectifs locaux de pompiers et de protection civile.

Huit bassins d’appoint, d’une capacité totale de près de 400 mètres cubes, seront installés sur les hauteurs jurassiennes et alimentés soit par pompage des eaux du Lac de Joux soit par transport aérien grâce à trois hélicoptères Super Puma qui serviront également à réalimenter une cinquantaine d’étangs naturels. Les éleveurs pourront alors y faire plus facilement le plein de leurs citernes mobiles. (Source : Canton de Vaud)

Également dans les Préalpes fribourgeoises

À la demande du canton de Fribourg, les autorités militaires ont annoncé le 22 juillet 2015 leur décision d’intervenir aussi dans la région du Lac Noir pour approvisionner en eau par hélicoptère les citernes de sept alpages situés à 1700 mètres d’altitude et installer un bassin de 53 mètres cubes. (Source : Département fédéral de la défense)

Prélèvements d’eau sans autorisation

L’intervention des hélicoptères de l’armée suisse a été marquée par deux incidents administratifs. Pour raccourcir son temps de rotation, l’un des pilotes a en effet décidé le 22 juillet d’aller puiser de l’eau dans l’Orbe et l’Aubonne alors même que le canton de Vaud interdisait tout pompage dans ses rivières en raison de la sécheresse.

Plus grave : deux autres hélicoptères, le lendemain et pour les mêmes raisons opérationnelles, ont effectué des prélèvements dans le lac français des Rousses proche de la frontière mais sans aucune autorisation officielle. L’armée suisse avait certes obtenu de la France un feu vert pour le survol provisoire du territoire dans le cadre de ses interventions d’aide aux alpages, mais nullement le droit de s’y approvisionner en eau d’autant que l’autorité départementale venait de prendre un arrêté restreignant les usages de l’eau.

Suite à ce qu’elle appelle une erreur d’interprétation des autorisations de survol, l’armée suisse dit avoir présenté ses excuses aux autorités locales et régionales, ainsi qu’à la population concernée et aux touristes pour les désagréments engendrés. Ce qui n’a pas empêché certains organes de presse de l’Hexagone d’accuser les Suisses de "voler" l’eau des Français, ou d’affirmer, à l’instar du site francetvinfo.fr, que "la guerre de l’eau fait rage à la frontière suisse", provoquant aussitôt un buzz sur les réseaux sociaux.

Prolongations

Vu que la sécheresse perdure et que les faibles précipitations de la fin juillet n’ont pas suffi à améliorer la situation, l’armée a décidé de prolonger de plusieurs jours son engagement dans les Préalpes fribourgeoises et dans le Jura vaudois. Début août et depuis le début de cette opération, c’est environ un millier de tonnes d’eau (un million de litres) qui ont déjà été transportés pour l’approvisionnement du bétail, nécessitant quelque 450 rotations d’hélicoptères à partir des lacs de Gruyère et de Joux.

 Pour en savoir plus, voir le site web de l’engagement de l’armée durant la canicule de 2015.



Glossaire

  • Interconnexion

    Pour assurer la continuité de l’approvisionnement de la population en eau potable de la meilleure qualité possible et en quantité suffisante, un distributeur doit disposer d’une ou plusieurs interconnexions de secours avec un ou plusieurs réseaux de distributeurs voisins. C’est l’une des solutions qui permet de garantir en permanence la sécurité d’une exploitation en cas d’accident ou en période de crise.

Mot d’eau

  • Jamais la même eau

    « Le cours de la rivière qui va jamais ne tarit, et pourtant ce n’est jamais la même eau. L’écume qui flotte sur les eaux dormantes tantôt se dissout, tantôt se reforme, et il n’est d’exemple que longtemps elle ait duré. Pareillement advient-il des hommes et des demeures qui sont en ce monde. » (Kamo no Chōmei, poète japonais, 1155-1216, "Hōjōki")


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