Coordinateur de cette campagne d’affichage de Pro Natura contre les pesticides, Markus Arn explique que "les grands lobbies de l’agriculture et de la chimie parviennent à vendre une fausse sécurité à la population, mais on sait maintenant avec certitude que les pesticides sont partout". Les risques sont d’autant plus subtils que l’on ignore les effets à long terme de ces substances toxiques.
En 2014, l’Institut suisse de recherche dans le domaine de l’eau (Eawag), mandaté par la Confédération, avait publié les résultats d’analyses (*) de plusieurs cours d’eau qui avaient permis de déceler la présence d’une centaine de produits phytosanitaires et de nombreux dépassements des normes de tolérance légale. Les chercheurs concluaient alors qu’une grande partie de la pollution actuelle en pesticides était imputable aux produits phytosanitaires de l’agriculture.
Parmi les produits les plus vendus et utilisés de par le monde comme désherbant figure le glyphosate (l’un des principaux composants du fameux Roundup), classé l’an dernier comme "probablement cancérigène" par le Centre international de recherche sur le cancer, une agence créée par l’Organisation mondiale de la santé. La Commission européenne doit par ailleurs se prononcer incessamment sur l’opportunité ou non d’autoriser encore son utilisation ou au contraire de l’interdire.
Pro Natura exige que les pesticides particulièrement toxiques soient retirés du marché suisse et que toutes les études importantes pour les homologations soient publiées. On sait que le gouvernement suisse devrait dans quelques semaines présenter un plan d’action pour la réduction des pesticides. Du côté de l’organisation écologiste, on est en tout cas fermement décidé à tout faire pour que ce programme se traduise "par des prescriptions sans équivoque" à l’adresse des agriculteurs.
Réplique paysanne :
une campagne jugée simpliste et tendancieuse
Les milieux agricoles de Suisse n’ont pas tardé à condamner "très sévèrement" la campagne lancée par Pro Natura. L’Union suisse des paysans (USP) – principale organisation faîtière de l’agriculture suisse – s’en est prise aussitôt à des propos qu’elle estime "simplistes, tendancieux et non nuancés".
D’abord parce que l’agriculture de ce pays, au cours des dernières années, a "consenti de gros efforts pour optimiser l’utilisation des produits phytosanitaires". Ensuite parce qu’elle a "rempli les exigences qualitatives toujours plus élevées qui sont posées aux denrées alimentaires qu’elle produit". Enfin parce qu’elle est "prête à prendre une part active pour encore y contribuer à l’avenir".
Selon l’USP, il est par ailleurs injuste de faire porter aux paysans suisses l’entière responsabilité du problème, puisque 40 et 50 % des denrées alimentaires sont importés, notamment de régions du globe où il n’est guère question de protection de l’environnement et de dosage des produits phytosanitaires.
Cela dit, l’Union suisse des paysans entend soutenir les propositions du Parlement fédéral concernant la surveillance du glyphosate et mettre tout en œuvre pour assurer "une utilisation aussi efficace que possible et limitée au strict nécessaire" des produits phytosanitaires et de réduire les risques liés à leur utilisation : il lui paraît essentiel dans ce contexte de prendre en compte les connaissances scientifiques en la matière.
(Sources : Pro Natura / Union suisse des paysans)
– En savoir plus sur le site de Pro Natura et sur celui de l’Union suisse des paysans
(*) Voir aussi l’article aqueduc.info : Cocktail de pesticides dans les rivières suisses, 5 mars 2014.