On compte sur le territoire béninois une quarantaine de massifs forestiers uniformément répartis et constitués de forêts privées, de forêts protégées en réserves ou parcs animaliers. Les forêts protégées sont à leur tour subdivisées en forêts classées, comme les Monts Kouffé, Eari Maro et Agoua, et forêts non classées et en réserves. Les parcs nationaux de la Pendjari et du W sont ouverts officiellement à la chasse et au tourisme d’octobre à mai.
Les forêts du Bénin sont reconnues, dans l’Ouest africain, pour la richesse de leur diversité biologique grâce à la présence en toute saison d’eau de bonne qualité. Cette interrelation fait pour ainsi dire des eaux et des forêts des sœurs siamoises. Qui préserve les forêts préserve aussi les eaux.
Quelques arbres de gros calibre s’imposent dans le paysage et alimentent les contes, les berceuses et les proverbes. Iroko, baobab, khaya, néré, karité et fromager : autant de seigneurs de la forêt que fréquentent lions, éléphants, buffles, crocodiles, singes, coqs de Buffon et de multiples colonies d’oiseaux. Les forêts du Bénin sont des richesses naturelles qu’on ne saurait échanger ni contre l’or ni contre le pétrole.
Aux sources du vaudou
Les forêts sacrées sont propriétés des religions endogènes. Elles sont les plus représentatives et les mieux protégées de toutes les forêts au Bénin, berceau du vaudou. Qui oserait en effet cueillir quoi que ce soit dans une forêt sacrée ? Ces forêts sacrées se distinguent les unes des autres par des fonctions particulières : elles accueillent qui des fétiches, qui des sociétés secrètes, abritent des génies ou protègent des cimetières. Toutes les communes ont leurs forêts sacrées, mais certaines, comme Savalou, Ouidah ou Sakété retiennent l’attention de savants en tous genres : herboristes, botanistes, thérapeutes, pédiatres ou gynécologues.
Sacrées, protégées, classées ou non classées, les forêts du Bénin sont en danger. Les principales menaces viennent de l’urbanisation, de l’agriculture sauvage, du chômage, de l’ignorance et de la permissivité des lois et décrets qui font la part belle à la corruption.
Le recul forestier consécutif à la pression démographique galopante et ses corollaires est une préoccupation réelle. En effet, plus de 80% de la population du Bénin dépendent du bois de feu et du charbon de bois pour faire la cuisine. Le karité est ainsi victime de sa célébrité : outre le beurre exploité par les industries du chocolat et celles des cosmétiques, son bois est omniprésent dans tous les ménages sous la forme de pilons et de mortiers utilisés pour la préparation de l’igname pilée (un plat très sollicité) et sous forme aussi de bois de chauffage.
Celui qui met le feu à la forêt…
La pression que l’homme exerce sur les forêts revient littéralement à scier la branche … On connaît la formule qui, en langue goun, se traduit par : « celui qui met le feu à la forêt, met aussi le feu à sa pitance et à son ventre ». L’heure est grave ! L’État fait certes des efforts d’aménagement des massifs forestiers et de reboisement annuel, il encourage l’utilisation de foyers améliorés très économes en énergie. Mais tout cela n’est que « goutte d’eau sur la pierre chaude ». Il faudrait réprimer la fraude, les coupes illégales et les prélèvements abusifs ; rendre plus sévères les règlements et les procédures judiciaires ; promouvoir d’autres sources d’énergie domestique ; favoriser dans les écoles l’éducation au développement durable.
Les forêts, tout comme l’eau et l’air, constituent un patrimoine commun à préserver. De véritables trésors y sont cachés. Et toute une année internationale ne sera pas de trop pour revisiter les forêts. Pour mieux les connaître dans toutes leurs diversités et leurs fonctions vitales.
Texte et photos :
Bernard Capo-Chichi
Porto Novo (Bénin)