Ce projet consiste à construire un barrage-réservoir de taille modeste (13 m de haut pour une retenue de 1,5 million de m3 et une surface d’une cinquantaine d’hectares) sur le Tescou, petit affluent du Tarn, non loin de Gaillac. Selon le Conseil général (assemblée délibérative départementale) du Tarn, qui appuie cette réalisation, il s’agit avant tout d’apporter une solution aux situations d’assèchement estival qui perturbent la qualité biologique du cours d’eau et de sécuriser l’approvisionnement en eau des exploitations agricoles riveraines. Cet ouvrage, dont le coût est estimé à plus de 8 millions d’euros, devrait être financé à hauteur de quelque 80% par des contributions de l’Union européenne et de l’Agence de l’eau Adour-Garonne.
Le problème, c’est que cet aménagement a pour conséquence de détruire une zone humide de 13 hectares, riche en biodiversité et abritant près d’une centaine d’espèces animales protégées. En guise de compensation, les autorités départementales ont prévu la création d’une autre zone humide de 19,5 hectares dans laquelle ces nombreuses espèces protégées devraient être transférées et réinstallées.
Des scientifiques, experts dans la protection du patrimoine naturel, ont toutefois fourni des avis défavorables à la destruction de ce réservoir de biodiversité. Selon eux, les inventaires de la faune y seraient très insuffisants, les connectivités écologiques sous-évaluées, les mesures de compensation irréalisables, voire inadéquates ou très hypothétiques.
Les opposants à ce projet se sont regroupés dans deux collectifs qui dénoncent à la fois un projet aux conséquences écologiques irréversibles, un modèle productiviste et désuet d’agriculture irriguée, ainsi que le recours à des fonds publics au bénéfice d’intérêts privés. Les contestataires bénéficient du soutien du parti Europe Écologie-Les Verts (EELV) qui a réclamé la suspension immédiate des travaux et l’examen des recours judiciaires en suspens. Les instances départementales leur rétorquent que toutes les procédures de consultation ont été suivies et qu’il n’est donc pas question de rouvrir le dossier.
Ségolène Royal, ministre de l’écologie, a toutefois décidé d’intervenir dans le débat. Dans un premier temps, elle a demandé aux autorités départementales du Tarn de s’assurer du respect des conditions posées à la création des retenues de substitution. Citée par l’AFP, elle a précisé que "l’eau est un bien précieux et rare qui doit faciliter l’agriculture, mais pas pour que certains pratiquent l’agriculture intensive dans des grandes exploitations en s’appropriant un investissement public". La ministre a ensuite chargé deux experts d’évaluer la qualité et les objectifs du projet et des mesures compensatoires destinées à préserver la biodiversité du site. Leur rapport devrait être déposé dans un délai relativement rapproché. (Sources : presse française, Conseil général du Tarn, prises de position des collectifs d’opposants)
27 octobre 2014
Des experts très critiques
Alors que de nouveaux affrontements tournent au drame et qu’il faut déplorer mort d’homme sur le site du barrage contesté, les deux ingénieurs généraux des ponts, eaux et des forêts mandatés pour expertise par le ministère de l’écologie, ont rendu public leur rapport final.
Des besoins réels, mais évalués de manière contestable (surdimensionnement, défaut d’analyse de solutions alternatives), une étude d’impact de qualité très moyenne, un financement fragile : les experts se montrent très critiques à l’encontre de ce projet.
Mais, tenant compte l’avancement des travaux et les engagements pris par les autorités avec les agriculteurs, ils estiment difficile d’arrêter le chantier et proposent d’améliorer le projet là où c’est possible, notamment de faire en sorte que les volumes d’eau résultant de la surestimation des besoins en irrigation soient affectés au soutien d’étiage et à l’augmentation de la réserve hydrique interannuelle. Ils recommandent également de mettre en place un comité de gestion représentant l’ensemble des acteurs locaux.
16 janvier 2015
Deux solutions techniques
La ministre française de l’écologie, Ségolène Royal, a validé deux solutions proposées par le rapport de mission complémentaire sur le barrage de Sivens, à savoir un réservoir plus modeste avec un bras de contournement permettant d’assurer la continuité du cours d’eau, ainsi qu’une alternative comprenant un ensemble de trois retenues latérales ou collinaires.
Ces propositions devraient sécuriser les besoins en eau découlant du projet de territoire, répondre à l’objectif d’atteinte du bon état des eaux, dans le respect des règles financières publiques en vigueur, et permettre l’obtention des financements européens. (Source : Ministère de l’Écologie)
7 mars 2015
Abandon du projet initial
Le Conseil général du Tarn accepte à la quasi-unanimité l’option d’un projet de barrage plus petit que le projet initial controversé et demande à l’Etat de faire procéder sans délai à l’occupation des manifestants. Quelques heures plus tard, le Ministère de l’Intérieur annonce que l’évacuation de la zone est terminée et qu’une vingtaine de personnes ont été interpellées.
1er juillet 2016
La justice déclare le barrage sans utilité publique
Le tribunal administratif de Toulouse a annulé l’arrêté de déclaration d’utilité publique de la retenue d’eau de Sivens, ainsi que deux autres arrêtés préfectoraux qui permettaient de déroger à la loi sur la protection des espèces protégées et autorisaient le défrichement de la zone.
– L’expertise du projet de barrage de Sivens (Tarn) est disponible sur le site du Ministère de l’écologie, de même que le rapport de mission complémentaire