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2001.

Prise de position du Groupe de travail suisse : „L’eau comme bien public" (2001)

Créé par la Communauté de travail des organisations suisses (...)

Créé par la Communauté de travail des organisations suisses d’entraide (Swissaid, Action de carême, Pain pour le prochain, Helvetas, Caritas, Eper), le groupe de travail "L’eau comme bien public" se présente comme "une large alliance avec des organisations et institutions qui s’accordent pour s’opposer à la privatisation de l’eau". Il s’est donné comme objectif de sensibiliser la population suisse - notamment les communes- au thème de l’eau. En novembre 2001, il a publié une prise de position "Pour une politique durable de l’eau dans l’intérêt public" qui a recueilli le soutien de nombreuses ONG.

RÉSUMÉ DE LA PRISE DE POSITION

Objectifs d’une économie durable des eaux

L’objectif d’une politique de l’eau tournée vers l’avenir doit être une exploitation des ressources hydriques écologiquement durable, équitable sur le plan social et économiquement viable. Une économie durable de l’eau repose sur

  • le pouvoir de décision démocratique des citoyens
  • un prix de l’eau abordable pour tous les citoyens
  • un contexte général favorable à la protection de l’environnement
  • des conditions d’emploi équitables
  • pas d’autres bénéfices tirés de l’eau autres que ceux nécessaires aux rénovations
  • alimentation en eau effectuée si possible à partir des ressources régionales

L’eau : bien public ou marchandise commerciale ?

En Suisse, ce sont essentiellement des entreprises publiques qui s’occupent de l’alimentation en eau. Leur savoir-faire dans les domaines de l’économie des eaux, de la gestion des eaux usées et du relèvement de la qualité de l’eau est très vaste. Grâce aux compétences techniques des pouvoirs publics, il est possible de prendre des décisions démocratiques fondées. Un certain nombre de compagnies privées, mandatées par des collectivités publiques, participent aussi à l’alimentation locale ou régionale en eau.

Le Groupe de travail "L’eau comme bien public" est d’avis que les principes de cette structure sont à conserver. Il s’oppose résolument aux courants actuels, sous-tendus par diverses idéologies, visant à privatiser l’alimentation publique en eau et à confier cette tâche à des grands groupes internationaux, qu’ils soient suisses ou étrangers.

L’eau ne doit pas devenir une marchandise purement commerciale. La part publique de l’économie des eaux est bien plus importante que sa composante commerciale. Une économie durable des eaux ne s’accommode par ailleurs pas d’une privatisation du savoir-faire dont disposent actuellement les collectivités publiques.

Pour une utilisation durable de l’eau

L ’avis du Groupe de travail se fonde sur deux arguments principaux : 1) La privatisation complète de l’approvisionnement en eau et de l’évacuation des eaux usées va à l’encontre d’une utilisation durable de l’eau, 2) les efforts de privatisation poursuivent uniquement des buts financiers.

Les plaidoyers en faveur d’une privatisation complète de l’alimentation en eau reposent généralement sur des arguments d’économie de marché. Mais ils occultent cette particularité de l’eau comme ressource irremplaçable et indispensable à la vie et à la survie et ne prennent pas en compte les problèmes de la garantie à long terme d’une quantité suffisante d’eau potable de haute qualité.

Les grands groupes privés de l’alimentation en eau, qui échappent au contrôle démocratique et sont axés uniquement sur le profit, ont forcément tendance à prendre des décisions stratégiques sur la base de considérations purement économiques.

Entre autres conséquences, la prise de position mentionne l’extension forcée des réseaux de distribution à grande distance, l’augmentation des ventes qui incitent au gaspillage, la perte de savoir-faire du secteur public ou encore les effets négatifs sur les structures de gestion orientées vers l’écologie.

L’eau, "monopole naturel"

Les arguments d’économie libérale avancés par les collectivités publiques qui privatisent leur système d’alimentation en eau ne résistent pas à une analyse détaillée. Privatiser les monopoles naturels et les placer sous la responsabilité de groupes privés ne sert qu’à remplir les poches de quelques-uns aux dépens du bien-être commun.

En Suisse, dans leur écrasante majorité, les adductions publiques d’eau sont rentables, s’autofinancent grâce aux taxes d’eau et font l’objet d’une politique responsable, échelonnée sur plusieurs décennies, de renouvellement et d’entretien des infrastructures.

De plus, les prix de l’eau sont modiques. Dans l’optique des consommateurs, il n’y a pas de raison plausible de confier l’économie suisse des eaux à des acteurs privés. La qualité de l’eau livrée est bonne et tout un chacun peut s’acquitter de son prix.

Menaces sur la qualité de l’eau

Un commerce libéralisé et fonctionnel de l’eau mettrait sérieusement en
péril la qualité de l’eau potable. La privatisation complète de l’alimentation en eau pourrait amener à relier diverses régions d’approvisionnement par des conduites interconnectées et à proposer aux consommateurs finaux de l’eau de deux ou trois groupes privés se faisant concurrence.

Mais l’eau de boisson n’est pas un bien homogène et toujours identique. En fonction de la source considérée, elle présente des paramètres physiques, chimiques et microbiologiques différents. Si des eaux potables très diverses sont mélangées, le danger de modifications négatives hypothéquant ou excluant une utilisation comme eau potable est considérable.

Pour une convention internationale de l’eau

Convaincu que l’’alimentation en eau doit continuer d’incomber à l’État et que l’eau doit donc figurer comme un bien public dans la Constitution fédérale, le Groupe de travail "L’eau comme bien public" attend également que la Suisse s’engage en faveur d’une convention internationale de l’eau articulée autour des grands axes suivants :

  • Tout homme a le droit de disposer d’eau potable propre
  • L’eau est un bien commun et ne doit pas devenir un pur produit commercial en mains privées
  • Un tribunal d’arbitrage doit être institué pour servir de médiateur dans les conflits internationaux
  • Il faut tenir compte des droits d’utilisation traditionnels
  • La démocratie instaure les conditions optimales d’une politique équitable de l’eau
  • Il faut mettre fin au gaspillage des ressources hydriques
  • Il convient de lutter à l’échelle du globe contre la pollution des eaux
  • Il faut inscrire le principe du pollueur payeur dans le droit des eaux.

 Document intégral sur le site de AllianceSud, nouveau nom de la Communauté de travail (pdf, 96Kb)
 Dossier EAU de AllianceSud (www.alliancesud.ch)



Mots-clés

Glossaire

  • Interconnexion

    Pour assurer la continuité de l’approvisionnement de la population en eau potable de la meilleure qualité possible et en quantité suffisante, un distributeur doit disposer d’une ou plusieurs interconnexions de secours avec un ou plusieurs réseaux de distributeurs voisins. C’est l’une des solutions qui permet de garantir en permanence la sécurité d’une exploitation en cas d’accident ou en période de crise.

Mot d’eau

  • Jamais la même eau

    « Le cours de la rivière qui va jamais ne tarit, et pourtant ce n’est jamais la même eau. L’écume qui flotte sur les eaux dormantes tantôt se dissout, tantôt se reforme, et il n’est d’exemple que longtemps elle ait duré. Pareillement advient-il des hommes et des demeures qui sont en ce monde. » (Kamo no Chōmei, poète japonais, 1155-1216, "Hōjōki")


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