On connaît encore mal les espèces vivant dans les grands lacs d’Europe. Dans la plupart des cas, les seules données disponibles sont les statistiques de la pêche. On sait quelles espèces et combien de poissons sont capturés et combien sont relâchés, mais on ignore l’étendue réelle de leur diversité.
En 2010, Année internationale de la biodiversité, l’EAWAG et le Musée d’histoire naturelle de Berne ont lancé un projet destiné à faire un peu de lumière sur les profondeurs des lacs : des pêches systématiques sont organisées et les espèces trouvées sont identifiées, mesurées et photographiées et les statistiques des captures analysées. Ce ‘Projet Lac’ doit également permettre de mieux comprendre pourquoi la diversité des espèces et la composition de la biocénose peuvent varier d’un lac à l’autre et quelles raisons écologiques entraînent l’apparition ou la disparition d’espèces.
L’enjeu n’est pas seulement d’acquérir des connaissances scientifiques, mais aussi de conserver les populations de poissons des lacs alpins et périalpins. Au Musée d’histoire naturelle de Berne, une vaste collection de poissons et d’échantillons de tissus a été et servira de référence pour les futurs travaux de recherche sur le plan international. D’autres inventaires sont prévus cette année encore, notamment dans les lacs de Joux, de Brienz, de Neuchâtel et de Lugano.
Jusqu’ici trois lacs ont fait l’objet de pêches, le lac de Morat ainsi que les deux lacs français d’Annecy et du Bourget. Plus de 8’000 poissons et 29 espèces ont été inventoriés. Les résultats du lac de Morat montrent que plus d’un tiers des espèces de poissons décrites en 1840 ont disparu. Les biotopes structurés du lac, qui jouent un rôle important pour les poissons, ont diminué de 30%. Et près de 30 % des rives sont aujourd’hui artificielles et construites. Enfin, l’oxygène qui permettrait la survie des espèces de poissons vivant en eau plus profonde, manque à partir de 20 mètres de profondeur.
Les chercheurs ont découvert des espèces jusqu’ici inconnues dans le lac de Morat : des gardons rouges, des loches de rivière et une carpe prussienne. Dans leur diagnostic, ils notent que la pêche, professionnelle et de loisir, a un impact sélectif sur la composition des espèces : les pêcheurs capturent proportionnellement trop de sandres, de brochets et de silures par rapport à l’importance de leur présence dans le lac. (Source : Eawag)