Conformément à la Directive cadre sur l’eau (DCE), la Commission européenne se devait de publier cette année un rapport intérimaire sur son application et sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre des programmes de mesures prévus par les États membres dans leurs plans de gestion des bassins hydrographiques. C’est chose faite sous la forme d’une communication adressée au Parlement et au Conseil européens et accompagnée d’un rapport de 143 pages (rédigé à partir des rapports remis par les États membres à fin 2012) d’où il ressort, sans surprise aucune, que les objectifs fixés pour 2015 sont bien loin d’être atteints : 23% seulement des mesures de base et des exigences minimales prévues par la directive ont été signalées comme appliquées, 66% sont en cours d’exécution et 11% n’ont pas encore été prises en compte.
Trois pays seulement – l’Autriche, la Finlande et les Pays-Bas - remplissent à ce jour les trois critères fondamentaux exigés par l’UE, à savoir : l’analyse des pressions exercées sur les ressources en eau et de leurs impacts, l’évaluation des mesures portant sur l’état des eaux et la mise en place des systèmes de surveillance.
La législation de l’Union européenne a certes permis d’améliorer la protection des eaux, lit-on dans le communiqué publié à Bruxelles. La plupart des Européens peuvent sans aucun danger boire l’eau du robinet et se baigner dans des milliers de zones côtières, rivières et lacs de leurs pays. Mais certains voyants sont au rouge : "des décennies de détérioration et de gestion inefficace rendent la perspective d’une bonne qualité environnementale pour l’ensemble des eaux de l’Union encore assez lointaine. Ce qui, à son tour, génère des coûts supplémentaires pour la purification de l’eau et risque de mettre en danger la santé humaine."
Le rapport lui-même pointe du doigt de nettes insuffisances dans l’application des mesures de base (telle la directive sur les nitrates) en matière de lutte contre la pollution diffuse de l’agriculture ou dans l’évaluation de l’opportunité de réduire la pollution chimique. Insuffisances également dans le domaine de la régulation du débit des eaux de surface et des modifications apportées aux cours d’eau, entravant ainsi leur bon écoulement (l’hydroélectricité est très souvent citée comme l’un des principaux facteurs d’interruption de leur continuité écologique), ce qui impliquerait de prendre des mesures supplémentaires. Le rapport met par ailleurs en évidence l’excès de prélèvements à des fins d’irrigation dans les pays riverains de la Méditerranée et de la mer Noire. Par contre, les mesures relatives à l’amélioration du traitement des eaux usées semblent avoir progressé de manière significative.
L’une des raisons les plus fréquemment avancées pour expliquer les retards des États dans la mise en œuvre de la Directive cadre sur l’eau et des mesures supplémentaires qu’elle préconise est semble-t-il de nature économique et financière. Cette explication contraste avec le diagnostic du rapport, lequel affirme que les États membres n’ont pas vraiment mis à profit les fonds que l’UE met à leur disposition pour, entre autres, traiter les eaux résiduaires ou réduire les risques d’inondation en restaurant par exemple des zones humides.
Dans ses recommandations, la Commission européenne insiste notamment sur la nécessité pour les États :
– de se doter de bases de données et de méthodes rationnelles d’évaluation des pressions et des impacts sur les écosystèmes aquatiques, de manière à prendre des mesures réellement appropriées,
– d’améliorer la surveillance de l’état des eaux de surface en particulier, et de façon prioritaire, quant à l’éventuelle présence de substances pouvant nuire à leur qualité,
– de renforcer les mesures obligatoires (et non seulement volontaires) de lutte contre la pollution diffuse d’origine agricole,
– d’adapter les prélèvements et usages de l’eau aux objectifs environnementaux de la directive cadre et aux impératifs du développement durable,
– de protéger et au besoin de restaurer les flux hydrologiques, et de porter remède aux modifications physiques qui empêchent le bon écoulement des cours d’eau,
– d’appliquer des tarifications adéquates des différents usages de l’eau en vue de réduire sa consommation inutile,
– ou encore de s’appuyer davantage sur des structures efficaces pour améliorer la coopération entre les entités administratives et les gestionnaires de l’eau. (Source : UE)