C’est une information publiée par le journal dominical suisse alémanique NZZ am Sonntag et confirmée par l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) : à cause de la crise énergétique, les produits chimiques nécessaires à l’épuration des eaux usées ne se trouvent plus aussi facilement sur le marché et dans certains lacs de petite taille la quantité de phosphore dépasse déjà les limites autorisées.
Il y a une cinquantaine d’années, les lacs suisses étaient en mauvais état, victimes d’un excès de substances nutritives, d’azote et de phosphore en particulier, ce qui avait pour conséquence d’accroître les biomasses végétales et animales et d’accélérer la production d’algues. À partir des années 1980, grâce aux performances des stations d’épuration (STEP) et à l’interdiction des phosphates dans les lessives, la plupart des grands plans d’eau du pays ont retrouvé une meilleure santé. La concentration de phosphore y est redescendue à un niveau proche de l’état naturel.
Pour éliminer le phosphore des eaux usées et empêcher qu’il se déverse dans les cours d’eau et les lacs, il existe plusieurs techniques, biologiques ou physico-chimiques. Dans le second procédé, le plus fréquent, les stations d’épuration recourent à des produits chimiques comme les sels de fer ou d’aluminium. Ceux-ci, par le biais de processus de coagulation et de floculation, entraînent une précipitation du phosphore dissous, c’est-à-dire son passage à un état solide qui rend possible sa récupération et sa valorisation pour répondre aux besoins de l’agriculture.
Or, révèle la NZZ am Sonntag [1], les stations d’épuration subissent aujourd’hui un contrecoup inattendu de la crise énergétique : les "précipitants" du phosphore font de plus en plus défaut sur le marché des produits chimiques. Si l’on en croit l’Association suisse des professionnels de la protection des eaux (VSA) dont le journal zurichois se fait l’écho, dans plus d’un tiers des commandes, les livraisons ont été incomplètes et certaines ont même parfois été interrompues pendant un moment. De ce fait, certaines STEP n’auraient pas toujours pu respecter les limites légales de leur concentration de phosphore [2]. Et pour la majorité d’entre elles, l’objectif serait aujourd’hui d’économiser autant que possible ces précipitants tout en veillant à ne pas dépasser les normes de protection.
Toujours selon la NZZ am Sonntag, la situation est prise très au sérieux du côté de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) qui a mis sur pied un groupe de travail ad hoc. Il faut savoir qu’une augmentation des apports de phosphore dans les eaux pourrait avoir des impacts importants dans les petits lacs dont les teneurs en oxygène ne répondent pas encore aux normes minimales, à l’instar du Lac de Morat (FR), du Greifensee (ZH) et du Baldeggersee (LU), dont certaines zones pourraient alors devenir inhabitables pour les poissons et d’autres espèces animales. (Source : NZZ am Sonntag/ATS)