La SERV rappelle que les agences de crédit à l’exportation avaient dès le début de la procédure soumis l’octroi d’assurances contre les risques à l’exportation à des conditions strictes : « le principal objectif consistait à limiter l’impact du projet de centrale électrique sur les habitants de la région, l’environnement et les biens culturels et de satisfaire aux normes promulguées dans ces domaines par la Banque mondiale ». En décembre 2008, elles avaient assigné les entreprises concernées à suspendre leurs contrats de construction et de livraison et avaient fixé au 6 juillet 2009 le délai de mise en conformité aux normes exigées.
La Suisse avait en son temps accordé des garanties à hauteur de 225 millions de francs aux quatre entreprises helvétiques impliquées dans ce projet, à savoir : Maggia, Colenco et Stucky, actives dans la construction et l’ingénierie, et Alstom, fabricant de turbines. Selon Alexander Schwab, porte-parole du consortium d’entreprises, cité par l’Agence télégraphique suisse (ATS), le montant total des pertes de contrats que pourrait provoquer le retrait des garanties de risques pourrait s’élever à quelque 680 millions de francs suisses. Reste à savoir si la Turquie, qui n’est probablement pas en mesure de construire seule le barrage et sa centrale électrique, fera appel notamment à des entreprises chinoises, russes ou indiennes.
À l’inverse, les organisations de protection de l’environnement et de défense des droits de l’homme, saluent positivement la décision des trois gouvernements. Pour la Déclaration de Berne, association qui lutte pour un monde plus juste et plus solidaire, c’est là une victoire importante. Elle souligne qu’au cours des 65 années d’existence de la garantie suisse contre les risques à l’exportation, jamais aucune caution accordée n’avait été retirée. Le retrait définitif du soutien au projet d’Ilisu restait selon elle l’unique solution adéquate : « Pour la première fois, la protection des personnes, des biens culturels et de l’environnement obtient la priorité face aux intérêts économiques à court terme ».
Dans sa forme actuelle, le projet, qui remonte aux années 1980, comprend la construction de 19 centrales électriques, qui généreraient 1.200 mégawatts et contribueraient, selon Ankara, au développement économique et social dans le sud-est de la Turquie. Selon ses opposants, la construction du barrage d’Ilisu, situé près de la frontière syrienne, devrait entraîner le déplacement forcé de plus de 50’000 riverains kurdes et menacera le patrimoine culturel millénaire de la ville de Hasankeyf. (Sources : SERV et presse suisse)