Voilà comment Robert Hainard justifiait son choix de la gravure sur bois, une technique qu’il a largement privilégiée et qu’il est nécessaire de connaître un tant soit peu si l’on veut vraiment comprendre son oeuvre. Lui qui ne se contentait guère de la facilité disait aussi : « Ce que j’aime, c’est de revivre peu à peu la scène que j’ai vue et croquée en la faisant surgir fraction par fraction de la matière que je travaille ».
Né de parents peintres, il baigne dans le milieu artistique. Très tôt il commence à dessiner et sculpter des animaux. À l’École des Arts industriels de Genève (devenue les Arts Décoratifs), il apprend durant quatre ans le métier de sculpteur sur bois, puis sur pierre. Il se considérera d’ailleurs toute sa vie d’abord comme sculpteur avant d’être peintre.
C’est à partir de la sculpture qu’il a découvert son procédé artisanal lent et minutieux, si personnel, de la gravure sur bois en couleurs et qu’il ne cessera de pratiquer. « A ma connaissance, dira-t-il un jour, je suis le seul, dans le temps et dans l’espace à utiliser systématiquement ce procédé, quoiqu’il apparaisse incidemment et souvent accidentellement chez nombre de graveurs ».
De suite (ou trente ans après !) le croquis aboutira à la gravure : des nombreuses planches de bois taillées pour les coloris (une planche pour une couleur) au travail de la mise en couleur et à la presse (vieille presse anglaise) avec les essais jusqu’à l’épreuve finale.
Un jour par hasard, il découvrit une façon spéciale de graver (en s’inspirant des graveurs japonais) qui lui permit d’obtenir des dégradés de couleur. En s’exprimant ainsi par la gravure, le peintre a obtenu des effets nocturnes d’une profondeur et d’un velouté quasiment miraculeux.
Michèle Martin
Photographies Collection Fondation Hainard