Il y a urgence. L’annuaire du PNUE rappelle un certain nombre de projections récentes en matière d’accès à l’eau : dans une vingtaine d’années, près de 4 milliards d’êtres humains pourraient se retrouver dans un environnement de stress hydrique (moins de 1’700 mètres cubes d’eau disponible par personne et par an). La situation est d’ores et déjà dramatique pour le milliard de personnes qui n’ont actuellement pas d’accès à l’eau potable et pour les deux milliards et demi qui sont privés du minimum d’équipements sanitaires. Une évidence s’impose : il y a une pressante nécessité d’améliorer la productivité de l’eau. C’est-à-dire : produire plus avec moins d’eau, dans l’agriculture comme dans l’industrie.
L’eau de pluie sous-estimée
L’agriculture représente, en moyenne mondiale, plus des deux tiers des prélèvements d’eau. Et, en règle générale, les politiques de l’eau dans le domaine agricole portent sur la maîtrise de ses flux superficiels (barrages d’irrigation par exemple) ou l’exploitation des nappes phréatiques. Or, souligne le PNUE, on oublie qu’en fait ce sont les pluies qui sont à la base de 60 à 70 % des récoltes. 95 % des agriculteurs dépendent des pluies en Afrique subsaharienne et 60 % en Inde, malgré le développement des systèmes d’irrigation.
Si les pluies font défaut aux moments critiques des cultures, c’est le déficit annoncé. Et la multiplication des mauvaises récoltes fait que de plus en plus d’agriculteurs se préoccupent d’abord de réduire les risques d’échec plutôt que chercher à améliorer les rendements et à investir dans des technologies plus efficaces. Si la productivité de l’eau n’est pas rapidement améliorée dans l’agriculture pluviale, le monde, d’ici la moitié du siècle, aura besoin de deux fois plus d’eau pour se nourrir.
Des modèles théoriques et des études de terrain montrent que des méthodes agricoles intégrées complétées par une bonne gestion des eaux de pluie peuvent augmenter de manière significative la disponibilité de l’eau. Dans les régions semi-arides de l’Inde méridionale, 50 millimètres d’irrigation supplémentaire en période sèche ont nettement fait grimper les rendements. Idem au Kenya, grâce à des systèmes de stockage d’eau de pluie.
Autre préoccupation manifestée par le PNUE : les eaux usées des villes. Une récente étude menée dans 53 villes de plusieurs continents a constaté que 80% de leur population consommaient des produits agricoles cultivés avec des eaux urbaines polluées. Si ces eaux usées étaient correctement traitées, elles pourraient avoir un impact significatif sur la réduction des coûts de production. Dans le cas contraire, il faut évidemment s’attendre à une détérioration de plus en plus grave de la santé des habitants.
Des usages industriels plus économes
Les usages industriels de l’eau sont certes nettement inférieurs à ceux du secteur agricole, mais ils augmentent en même temps que le niveau d’industrialisation : aujourd’hui, les industries prélèvent 10 % de l’eau dans les pays à faibles et moyens revenus contre près de 60 % dans les pays à revenus élevés.
Grâce à de nouvelles technologies et grâce aussi à de nouvelles habitudes de consommation plus économes en eau, plusieurs pays industrialisés ont réussi à briser ce cercle vicieux de la croissance économique liée aux usages de l’eau. D’autres pays ont également commencé à améliorer la productivité de l’eau dans les processus de fabrication industrielle. Le rapport du PNUE en fournit quelques exemples :
– Une papeterie finlandaise est passée d’un traitement chimique à un traitement thermomécanique des pâtes à papier et ses eaux usées sont épurées grâce à des processus biologiques. 90% d’économies d’eau.
– Un fabricant de textile indien utilise du zinc plutôt que de l’aluminium dans le processus de fabrication des tissus synthétiques. 80 % d’économies d’eau et des eaux usées assez propres pour irriguer les cultures avoisinantes.
– Une société mexicaine de canne à sucre a séparé ses eaux selon leurs différents usages et réduit leur consommation de 90 %.
– Une entreprise espagnole, qui gère 300 km d’autoroute dans l’État de São Paulo au Brésil, a conçu ses routes de manière à canaliser l’eau de pluie vers quelque 250 zones de rétention d’une capacité totale de 2 millions de mètres cubes. L’eau de pluie s’infiltre lentement dans le sol et participe à la recharge de l’aquifère Guarani. (Sources : informations et annuaire PNUE)
Liens
– Site du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE)
– Initiative du PNUE pour une économie verte