Le schéma, désormais connu, est resté identique aux salons précédents : d’un côté, sur un espace un peu plus vaste qu’en 2010, une centaine d’exposants venus de Suisse romande et de Suisse alémanique (près des deux tiers) ; de l’autre, une succession de séminaires techniques, largement fréquentés, mis sur pied par les associations faîtières des différents secteurs professionnels représentés dans l’exposition.
À l’heure du bilan, les organisateurs ont enregistré une légère hausse de participation avec quelque 3’700 entrées, ce qui confirme la position-clé de cette plateforme suisse dans le domaine de la distribution d’eau, de l’assainissement et du gaz. Ils notent avec plaisir "le professionnalisme des exposants", lesquels, de leur côté, se disent tout aussi heureux du "haut niveau de compétence des visiteurs".
L’intérêt de ce type de manifestation est précisément de mettre en contact direct les gens de terrain, des fontainiers aux chefs d’exploitation, appartenant pour la plupart à des services publics communaux ou intercommunaux, et des fournisseurs d’équipements dont une majorité fait visiblement partie du tissu des petites et moyennes entreprises. À sa manière, le Salon aqua pro gaz traduit un certain consensus helvétique pour la collaboration entre les secteurs public et privé dans le domaine de l’eau.
Dans les stands et d’une édition à l’autre, au-delà des changements de design des appareils en tous genres, il faut être expert pour percevoir les réelles innovations. L’inventaire des technologies proposées y est relativement dispersé : on y trouve des instruments d’analyse et de mesure des flux d’eau, de gestion informatique et de commande à distance, de contrôle de canalisations, de techniques de traitement des eaux potables et d’épuration des eaux usées, sans parler des équipements mieux connus de monsieur tout le monde : tuyaux, vannes, dérivations, hydrantes et autres installations hydrauliques de base.
De la ressource au robinet, jusqu’à la STEP
Parallèlement à l’exposition, les séminaires techniques mis sur pied à l’initiative des associations professionnelles faîtières se révèlent d’année en année toujours plus étoffés et davantage suivis, ce qui est loin de déplaire aux organisateurs même quand le nombre des participants dépasse de loin ce qui avait été prévu.
S’agissant du domaine de l’approvisionnement en eau potable et de l’assainissement, c’est de toute évidence les micropolluants qui ont tenu le devant de la scène. Leur problématique a été abordée sous plusieurs angles : les exigences de la loi sur les denrées alimentaires, l’état actuel des connaissances scientifiques, les moyens de traitement à disposition des distributeurs et des exploitants de stations d’épuration, l’information des usagers et des consommateurs. Que faire des micropolluants ? La question, visiblement, tracasse bien des professionnels de l’eau.
En matière de protection des eaux, ce Salon a également fourni l’occasion de dresser un bilan de 20 années de ce que les spécialistes, sans jamais dévoiler l’intitulé exact de ces quatre lettres, appellent le PGEE. C’est-à-dire le ’Plan général d’évacuation des eaux’ défini par la législation suisse et dont la mise en œuvre incombe aux collectivités locales. Un sondage mené auprès de plus de 700 communes de Suisse romande montre que cet outil de gestion et de planification est encore loin d’avoir atteint tous ses buts.
En maints endroits, y compris dans certaines administrations cantonales, sa mise en œuvre n’est pas considérée comme prioritaire. Les questions ne manquent pas : comment inciter à la mise en pratique de ces plans, comment professionnaliser davantage encore la gestion de l’assainissement, comment mettre en place d’éventuels projets de régionalisation de la protection des eaux, par exemple au niveau des bassins versants ? Un PGEE n’a rien d’un long fleuve tranquille, dira un responsable communal fribourgeois. Plutôt un très long fleuve capricieux.
Ressources en eau, gestion et défis futurs
À porter le regard vers l’amont comme vers l’aval des ressources en eau, ce qu’a par exemple tenté de faire un séminaire sur leur gestion face aux défis futurs, les questions semblent aujourd’hui plus nombreuses que les réponses : comment se protéger mieux encore contre les crues annoncées ? comment rétablir les fonctions naturelles des rivières et garantir leur espace vital ? comment, lorsque survient la sécheresse, assurer entre les divers usagers un partage équitable des prélèvements, entre autres pour satisfaire les besoins d’irrigation de l’agriculture ? comment exploiter judicieusement le petit reste de potentiel hydroélectrique dont bénéficie encore ce pays ?
Face aux intérêts divergents et aux logiques locales, l’idée de la gestion intégrée des ressources hydriques paraît cependant faire peu à peu son chemin. Mais on voit bien - le canton de Fribourg en fait l’expérience - que dès la première étape, celle qui consiste à délimiter les bassins versants, les décisions sont un peu plus compliquées à prendre sur le terrain que dans une administration, autour d’une simple carte hydrographique. Un Salon, comme celui que vient d’héberger l’Espace Gruyère de Bulle, sert aussi à cela : encourager les synergies.
Bernard Weissbrodt
Lire aussi :
– Que faire des micropolluants dans l’eau potable ?
– Coopération entre communes pour la distribution de l’eau : une question de survie pour les Franches-Montagnes
– Les précédentes éditions de aqua pro gaz
sur aqueduc.info