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27 novembre 2014.

La remunicipalisation des services de l’eau a le vent en poupe

Depuis l’an 2000 et dans 35 pays du nord et du sud de la (...)

Depuis l’an 2000 et dans 35 pays du nord et du sud de la planète, quelque 180 municipalités – dont plusieurs capitales, Paris, Maputo, Buenos Aires, Kuala Lumpur et d’autres - ont repris à leur compte la gestion des services de l’eau. Pour les auteurs de cet état des lieux publié par un réseau d’observation et d’information sur la mondialisation, cette tendance doit être comprise comme "une réponse aux fausses promesses des opérateurs privés et à leur incapacité à placer les besoins des gens avant la recherche de profit".

"Là pour durer : la remunicipalisation de l’eau, un phénomène global en plein essor" : l’étude menée conjointement par le Transnational Institute (TNI, Pays-Bas), la Public Services International Research Unit (PSIRU, Grande-Bretagne) et l’Observatoire des multinationales (France) propose une vue d’ensemble des cas récents de remunicipalisations des services de l’eau et de l’assainissement dans le monde.

Si l’on en croit ce rapport, plus de 180 villes et collectivités de 35 pays ont repris le contrôle de leurs services d’eau au cours des 15 dernières années. Ce retour à une gestion publique paraît même s’accélérer : 81 remunicipalisations ont eu lieu dans des pays à revenus élevés entre 2010 et 2014, deux fois plus que durant les 5 années précédentes.
Accra (Ghana), Berlin (Allemagne), Buenos Aires (Argentine), Budapest (Hongrie), Kuala Lumpur (Malaisie), La Paz (Bolivie), Maputo (Mozambique) et Paris (France) figurent en bonne place dans la liste des grandes villes qui ont remunicipalisé leur eau. Inversement, les nouvelles privatisations, à l’instar de Nagpur (Inde) ou Djeddah (Arabie saoudite) sont plutôt rares.

Malgré le fait que pendant trois décennies les institutions financières internationales et nombre de gouvernements ont encouragé les partenariats public-privé, voire les privatisations, il est désormais clair, lit-on dans ce rapport, "que la remunicipalisation de l’eau, en tant qu’option politique, est là pour durer. L’expérience directe des problèmes communément associés à la gestion privée de l’eau – manque d’investissements dans les infrastructures, hausses tarifaires, risques environnementaux - a convaincu d’innombrables citoyens et décideurs politiques que le secteur public est le mieux placé pour fournir des services de qualité et promouvoir le droit humain à l’eau".

Tirant quelques enseignements de leurs recherches, les auteurs de ce rapport notent, entre autres, que dans une majorité de cas, la remunicipalisation passe par la résiliation pure et simple des contrats privés, même avant leur échéance (en France cependant, où 49 cas de remunicipalisation ont été recensés alors que ce pays a donné naissance aux plus grandes multinationales du secteur de l’eau, cela se passe le plus souvent au moment où se pose la question du renouvellement des délégations de services).

Autre constat : "en éliminant l’impératif de maximisation des profits qui caractérise le secteur privé, la remunicipalisation de l’eau conduit souvent à une amélioration de l’accès et de la qualité des services". Selon les situations, cela se traduit par une meilleure efficacité des prestations, une restructuration des systèmes de tarification et une baisse des prix, une augmentation des investissements dans les équipements et les infrastructures, une information davantage transparente, une plus grande participation des usagers et des citoyens aux décisions, etc.

Mais les remunicipalisations ne vont pas sans risques du fait parfois des pressions exercées par les bailleurs de fonds internationaux ou les mécanismes de protection des investisseurs. C’est ainsi qu’on a vu certaines villes devoir verser des indemnités aux anciens opérateurs privés pour compenser leur manque à gagner (Indianapolis) ou pour racheter leurs parts de capitaux (Berlin), voire être poursuivies devant des tribunaux arbitraux internationaux (Buenos Aires).

Mais, à l’inverse, on voit aussi des opérateurs publics de l’eau proposer leur assistance à des villes qui souhaitent mener à bien un processus de remunicipalisation. Pour les auteurs du rapport, il ne fait aucun doute que ces nouveaux "partenariats public-public" représentent "une alternative viable aux partenariats public-privé et à leurs coûts exorbitants". (bw)

 Le rapport "Là pour durer : la remunicipalisation de l’eau, un phénomène global en plein essor", publié initialement en anglais, est disponible en version française et en format pdf sur le site multinationales.org



Mots-clés

Glossaire

  • Interconnexion

    Pour assurer la continuité de l’approvisionnement de la population en eau potable de la meilleure qualité possible et en quantité suffisante, un distributeur doit disposer d’une ou plusieurs interconnexions de secours avec un ou plusieurs réseaux de distributeurs voisins. C’est l’une des solutions qui permet de garantir en permanence la sécurité d’une exploitation en cas d’accident ou en période de crise.

Mot d’eau

  • Jamais la même eau

    « Le cours de la rivière qui va jamais ne tarit, et pourtant ce n’est jamais la même eau. L’écume qui flotte sur les eaux dormantes tantôt se dissout, tantôt se reforme, et il n’est d’exemple que longtemps elle ait duré. Pareillement advient-il des hommes et des demeures qui sont en ce monde. » (Kamo no Chōmei, poète japonais, 1155-1216, "Hōjōki")


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