Ainsi commence un étonnant manuscrit rédigé en automne 1909 par François Alphonse Forel, père de la limnologie, cette discipline principalement dédiée à l’étude des lacs et des eaux superficielles. Comme expliqué en avant-propos de sa présentation, ces 216 feuillets, « serrés entre deux cartons grisâtres reliés par une chevillière » sont pendant plus d’un siècle restés en sommeil dans le grenier de la maison familiale et n’ont été finalement découverts que tout récemment par l’un de ses arrière-petits-fils qui les a déchiffrés et retranscrits.
C’est donc à la fois une autobiographie (et un précieux document historique) que nous livrent les Presses polytechniques et universitaires romandes, dans laquelle F.A.Forel – dont on a célébré en 2012 le centenaire de la disparition – nous fait partager ses théories prospectives et dresse de son point de vue l’état des connaissances de l’époque.
« Au lieu de devenir médecin, confesse-t-il, je me suis voué à l’histoire naturelle. Cela étant, j’aurais dû entrer dans l’une des catégories dans lesquelles se partagent les naturalistes (…) Hélas : emporté par une curiosité mal réglée, je n’ai jamais pu résister à l’appel d’une étude, même en dehors de mes moyens ; chaque fois que j’ai rencontré à côté de mon chemin un fait intéressant, je n’ai pas hésité à le poursuivre et à chercher à le comprendre. »
C’est ainsi que dans son ‘testament’, F.A.Forel consacre de nombreux feuillets à des questions de limnologie – « la branche des sciences qui m’a le plus occupé » - mais aussi à d’autres disciplines telles que la géologie, la glaciologie, la sismologie, sans oublier les barques du Léman, sa collecte de sables ou encore le phylloxéra.
L’éditeur a eu la très bonne idée de compléter ce document par une dizaine de commentaires et de contributions de spécialistes actuels sur des thèmes chers à F.A.Forel, comme autant de clés pour la compréhension de l’héritage du savant vaudois et de l’évolution des disciplines qui lui tenaient à cœur. Warwick F.Vincent et Carinne Bertola notent, par exemple, qu’il serait temps « de se rappeler ce que Forel nous a légué : la mise en œuvre d’une approche globale où chaque discipline informe les autres dans un but de synthèse générale où l’homme est toujours présent, synthèse nécessaire aux décisions politiques et environnementales ». (bw)